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Leucémies virales

Communiqué de presse (23/05/2017)

Une avancée majeure dans la compréhension des leucémies : les virus
livrent leurs secrets
 

Bruxelles, le 23 mai 2017 - L’équipe de recherche dirigée par Anne Van den Broeke (Institut Jules Bordet – Université Libre de Bruxelles et GIGA - Université de Liège) vient de mettre en évidence un nouveau mécanisme par lequel certains virus induisent des leucémies. Cette découverte, publiée ce 23 mai dans la revue Nature Communications remet en question le fonctionnement de ces virus et ouvre la voie au développement de thérapies ciblées pour un type de leucémie particulièrement agressif.

Team of Mrs Van den Broeck
Equipe du Dr Van den Broeke
Etudier le virus de la leucémie bovine pour mieux comprendre les leucémies virales chez l’homme

Les infections virales sont responsables de ~12 % des cancers. HTLV-1 (Human T-cell leukemia virus), le premier rétrovirus oncogène découvert chez l’homme, infecte plus de 20 millions de personnes dans le monde. Il est l’agent étiologique de la leucémie à cellules T de l’adulte, un cancer dont le pronostic est malheureusement souvent défavorable. Le virus de la leucémie bovine (BLV) proche du virus HTLV-1 provoque une pathologie très similaire chez le bovin et le mouton. La maladie que développe le mouton constitue dès lors un modèle particulièrement intéressant pour l’étude des mécanismes menant aux leucémies, et au cancer en général.

Une des propriétés des rétrovirus tel que le BLV ou le HTLV-1 est leur capacité à s’intégrer dans le matériel génétique de la cellule infectée. Jusqu’ici, la principale explication biologique au développement de ces leucémies agressives reposait sur la production par le virus de facteurs ayant des propriétés cancérigènes intrinsèques, appelés protéines oncogènes. Toutefois, l’impact de la localisation du virus au sein de ce matériel génétique (génome) était jusqu’ici considérée comme négligeable. Pour la première fois, les chercheurs ont établi la preuve que, contrairement à ce dogme, les virus HTLV-1 et BLV s’intègrent de manière ciblée à proximité de gènes hôtes impliqués dans le cancer (cancer drivers). Plus surprenant encore, les chercheurs observent que ces gènes sont positionnés systématiquement en amont du virus, et non en aval comme on s’y attendrait. L’équipe va plus loin en montrant que ce sont des transcrits viraux « antisens » (des éléments produits en sens inverse par rapport aux facteurs classiquement synthétisés par le virus) qui sont responsables de la perturbation des gènes hôtes situés en amont, identifiant ainsi une des clefs du fonctionnement de ces virus oncogènes.

Grâce à de nouvelles méthodes de séquençage à haut débit, les chercheurs montrent que ces mécanismes
« antisens » sont déjà actifs lors des étapes très précoces de la maladie, bien avant que la leucémie ne devienne agressive. En criblant le génome à la recherche des gènes affectés, ils en identifient plusieurs centaines dont deux tiers seulement sont connus dans le domaine du cancer, révélant ainsi une mine insoupçonnée de nouveaux candidats « cancer drivers », candidats pour de nouvelles recherches sur la genèse de ces cancers

Ces travaux, réalisés en collaboration avec l’Hôpital universitaire Necker à Paris et une équipe canadienne de l’Université du Saskatchewan, sont un bel exemple de recherche interdisciplinaire combinant des domaines tels que la cancérologie, la pathogenèse virale et la génomique animale.

Nouvelles pistes de recherche et applications cliniques

La mise en lumière de ce processus de séquestration du génome hôte et la découverte du rôle insoupçonné des facteurs antisens viraux représente un grand pas dans la compréhension des mécanismes qui sous-tendent le développement tumoral. Maintenant que les chercheurs ont trouvé une des clefs du secret de BLV et HTLV-1, ils comptent explorer les moyens de bloquer ces facteurs antisens critiques, à la recherche de thérapies ciblées pour cette leucémie particulièrement agressive. Enfin, une des technologies de séquençage à haut débit développée dans le cadre de ce travail s’est avérée directement applicable en clinique. Le suivi des patients par cette méthode moléculaire optimisée permet pour la première fois de mieux évaluer la réponse au traitement, de prédire une rechute précoce et d’aider les cliniciens dans leurs décisions thérapeutiques.

  • Références de l’étude :
    Nicolas Rosewick, Keith Durkin, Ambroise Marçais, Maria Artesi, Vincent Hahaut, Philip Griebel, Natasa Arsic, Véronique Avettand-Fenoel, Arsène Burny, Carole Charlier, Olivier Hermine, Michel Georges & Anne Van den Broeke (2017) Cis-perturbation of cancer drivers by the HTLV-1/BLV proviruses is an early determinant of leukemogenesis, Nature Communications, doi: 10.1038/NCOMMS15264
     
  • Chercheurs senior :
    Dr Anne Van den Broeke (Institut Jules Bordet et GIGA-R) et Prof Michel Georges (GIGA-R). 
    Laboratoire d’Hématologie expérimentale, Institut Jules Bordet, Université Libre de Bruxelles (ULB), Boulevard de Waterloo 121, 1000 Brussels, Belgium - Unité de Génomique animale, GIGA-R, Université de Liège, Avenue de l’Hôpital 11, B34, 4000 Liège, Belgium.
     
  • Financement de l’étude :
    Ce travail a été financé par les Amis de l’Institut Bordet, le Fonds de la Recherche Scientifique (FRS), Télévie, l’International Brachet Stiftung (IBS) et la Fondation Lambeau Marteaux.
     
  • Collaborations internationales /
    Hôpital universitaire Necker, Paris, France – Dr Olivier Hermine et Dr Ambroise Marçais VIDO/Intervac, University of Saskatchewan, Saskatoon, Canada – Dr Philip Griebel
     
  • Pièce jointes :
    • Photo de l’équipe de recherche dirigée par Anne Van den Broeke
    • Figure scientifique expliquant la cancérogenèse virale (voir PDF joint pour image et légende)
       
  • Pour plus d’information:
    • Dr Anne Van den Broeke: anne.vandenbroeke@bordet.be
    • Prof Michel Georges: michel.georges@ulg.ac.be
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